La Distillation du Cognac
Le principe de base est de chauffer le vin pour en récupérer les composés volatils les plus parfumés et les plus aromatiques. Pour cela, nous utilisons des vins blancs produits dans la zone d'appellation d'origine dont le cépage principal est l'UGNI-BLANC.
La distillation doit se faire dans des alambics en cuivre rouge. Cet alambic se compose d'éléments très précis. On distingue en premier la chaudière, chauffée à feu nu sur laquelle on place un rectificateur qui peut se configurer sous plusieurs formes (tête de maures, olive ou oignon). A la suite de ce chapiteau se trouve le col de cygne qui a pour but de conduire les vapeurs les plus agréables vers un serpentin qui traverse une cuve pleine d'eau froide et qui provoque le passage de l'état volatile à l'état liquide. Ce dernier élément s'appelle la "pipe". La capacité de la chaudière pour la première chauffe peut aller jusqu'à 140 hectolitres.
Le vin est porté à ébullition, les premières vapeurs plus lourdes et non souhaitables commencent à monter dans le chapiteau qui démarre alors son travail en laissant passer uniquement les meilleurs arômes. Ces premières essences retombent dans le vin jusqu'à ce qu'elles soient d'une qualité irréprochable. A ce moment-là, elles peuvent continuer leur chemin dans le col de cygne puis arriver dans le serpentin où elles vont donner naissance au brouillis. Le brouillis est un liquide légèrement trouble, titrant entre 27 et 30 % vol. Il est peu odorant et rarement plaisant au goût. Les têtes et les queues de brouillis seront recyclées dans le vin pour subir une autre chauffe. C'est ici qu'opère la magie du Cognac puisque ce brouillis va subir une deuxième distillation.
En effet, le brouillis est mis dans des petites chaudières (25 hectolitres au maximum pour une bonne chauffe) et il va subir le même cheminement que dans la première partie, mais cette fois, le résultat final est l'Eau-de-Vie. A cette étape, le distillateur doit opérer avec minutie. Les premières vapeurs qui arrivent sont appelées "têtes", elles sont réutilisées dans le brouillis (elles ne représentent que 2 à 4 %) et dès que l'Eau-de-Vie titre aux alentours de 72% vol, commence alors le "cœur" qui sera le futur cognac. Le coeur est très limpide et très agréable à déguster (avec de l'eau distillée pour le ramener à 40 ou 45 % vol). Dès que l'on arrive aux alentours de 60 % vol, le distillateur change le liquide de récipient : c'est ce qu'on appelle faire la coupe. C'est à ce moment-là qu'arrivent les "queues" ou les "secondes". Elles se caractérisent dans l'Eau-de-Vie. Les têtes de bonne chauffe et les secondes sont soit réutilisées dans le vin, soit mises dans le brouillis suivant.
Le cycle de distillation s'étend environ sur 24 heures, c'est un travail très minutieux. Déjà lors de la distillation, la main de l'homme intervient de manière importante sur le produit fini. En effet, ce dernier peut incorporer plus ou moins de têtes et de queues dans le brouillis, il peut aussi travailler avec des lies finies. Toutes ces différentes options donneront des résultats finaux différents.
La distillation doit être terminée au 31 mars de l'année suivant la récolte. Une distillation fonctionne 24h/24. Pour faire un résumé peut-être plus parlant, il faut savoir que 2 500 litres de vin à 9.9 % Vol. donneront 354 litres d'Eau-de-Vie à 70 % Vol. Si la distillation n'est pas finie le 31 mars, l'Eau-de-Vie perd l'appellation Cognac.
C'est pour la région une période agréable où l'on retrouve dans l'hiver, au détour d'un virage, un nuage de brouillard qui n'est autre que le décuvage d'une chaudière.
Il est important de noter au niveau de la distillation la grande attention que le distillateur doit apporter afin d'éviter l'apparition des défauts. Ceux-ci peuvent apparaître au moment de la distillation, ou bien être déjà inclus dans le vin et s'amplifier lors de la distillation, qui concentre les vins et arômes et donc par la même occasion les défauts (s'ils sont déjà présents à la base).
Les défauts typiques
- Les défauts dus aux produits phytosanitaires caractérisés par des odeurs pharmaceutiques, de droguerie, des nuances d'hydrocarbures. Les pesticides utilisés pour la protection phytosanitaire du vignoble se retrouvent à l'état de résidus dans les moûts, et cette présence peut avoir des répercussions qualitatives importantes. La formation d'un pesticide fait intervenir de nombreux composés qui peuvent avoir une action polluante. L'influence organoleptique charentaise qui concentre les composés volatils du vin et qui peut révéler un défaut jusque là imperceptible.
- L'acroléine : odeur piquante de moutarde, nuances plastiques. L'acroléine est un produit de dégradation du glycérol, par certaines bactéries lactiques. Cette fermentation lactique appelée également amertume s'effectue à des degrés divers dans les vins destinés à l'élaboration du Cognac. La maladie est favorisée par les faibles teneurs en alcool des vins et la conservation sur lies.
- Le butyrique : odeur putride, mauvaise lie, rance, salaison, vin douteux. Ce défaut provient d'altérations bactériennes des vins prenant souvent naissance dans les lies. L'utilisation de cuviers enterrés (température de conservation élevée) non dégravelés (source de contamination) constitute un facteur de risque supplémentaire. Ces vins seront d'autant plus sensibles que leur acidité sera faible. En outre, la fréquence de ce défaut augmente en cours de conservation.
- L'acétate d'Ethyle : odeur de piqué, acescence, vernis, solvant. L'acétate d'éthyle est un ester volatil qui joue un rôle incontestable dans l'arôme des vins et eaux-de-vie. A des teneurs élevées, il est responsable à l'acescence. Les levures se formant en fin de la fermentation alcoolique.
- L'éthanal et l'acétal : eau-de-vie éthérée, oxydée, alcool à brûler, eau-de-vie de marc, pomme. Ce défaut provient d'une altération du vin soit pendant la phase fermentaire soit en cours de conservation. L'éthanal est un produit intermédiaire de la fermentation alcoolique. Sous l'effet de plusieurs facteurs, le vin peut s'enrichir en éthanal : ajout d'anhydride sulfureux en cours de fermentation, aération du vin ou conservation, dans des cuves en vidange, développement de levure de fleur en cours de conservation. Dans l'eau-de-vie, l'éthanal réagit avec l'alcool (éthanol) pour former de l'acétal (odeur d'alcool à brûler).
- Les alcools supérieurs : caractère lourd, herbacé, manque de finesse. Les alcools supérieurs sont des produits secondaires de la fermentation alcoolique. Ils sont synthétisés par la levure, leur formation dépend des conditions de la fermentation alcoolique et de la technique de vinification (souche de levure, température aération, débouchage).
- Les hydrocarbures : hydrocarbures, nez de machine de fond de garage, fuel, cambouis. Ce défaut peut avoir des origines multiples. Il convient de distinguer les pollutions de toutes natures (huile minérale, carburant, solvants, produits phytosanitaires), et les composés d'origine végétale issus de la dégradation des carotènes de la vigne. A ce titre, le défaut d'hydrocarbure est parfois associé au défaut herbacé.
- Herbacé : herbacé, végétal, sarments, verdeur, macération, herbe sèche, lourdeur. Ce défaut est lié aux traitements mécaniques subis par la vendange et aux conditions dans lesquelles ces traitements sont réalisés : température, oxygène...
- Rimé : rimé, cuit, brûlé, matières plastiques calcinées. Ce défaut de distillation est consécutif à un chauffage trop intense. Il est dû à un excès de lies au cours de la distillation ou à un nettoyage insuffisant de la chaudière (lie restant collée au fond ou sur les rivets). Le défaut rimé est peu étudié car peu fréquemment rencontré, il est la conséquence d'une erreur humaine.
- Les têtes, secondes, eaux-de-vie mal triées : pour les têtes, odeurs éthérées, solvants, vernis, pommes vertes, et pour les secondes, lourdeur, fruit cuit. Une distillation mal conduite, trop rapide, une séparation des produits de tête et de queue mal effectuée amène ces défauts de distillation. Les composés indésirables (acétate d'éthyle, éthanal, acétal) mais aussi des composés de l'arôme fruité de l'eau-de-vie (esters). Les secondes contiennent des éléments plus lourds moins volatils, alcools, esters et lourds. Il est donc conseillé de bien conduire la chauffe ou de s'équiper d'une installation d'automatisme de coupe.
La première coupe automatique fut pensée et mise au point par Gaston Roussille. Comme son nom l'indique, elle effectue la coupe des brouillis au degré désiré sans surveillance ni intervention. Son fonctionnement est simple et précis. Elle simplifie la distillation en lui apportant l'automatisme et en perfectionnant les alambics.
La coupe automatique se caractérise par deux capacités tubulaires verticales raccordées par un collecteur commun.
L'extrémité inférieure de chacun est terminée pour l'un par un bouchon vissé, permettant l'introduction d'un alcoomètre et pour l'autre d'un robinet de vidange.
Elle fût brevetée le 29 mars 1968 par son inventeur Gaston Roussille.